Axel Bâlon, fraichement diplômé du bachelier en chimie, a réalisé son stage de dernière année aux îles Féroé, archipel à mi-chemin entre l’Ecosse et l’Islande. Une expérience enrichissante qu’il nous fait partager.
Tu es parti aux Iles Féroé, comment as-tu eu l’idée d’une telle destination ?
Il y avait à cela plusieurs raisons : l’envie de partir à l’aventure, dans un endroit qui m’était tout à fait inconnu, l’envie et le besoin d’indépendance (et de découvrir comment je m’en sortirais seul), l’envie de surmonter le « défi » que représentait toute l’organisation du séjour, le fait de pouvoir mettre à l’épreuve mon niveau d’anglais, etc.
A cela s’ajoutent des raisons plus « pratiques » : un stage à l’étranger peut être un gros plus sur le CV, la découverte de nouvelles techniques, un milieu de travail différent et donc la nécessité de m’adapter, la possibilité d’avoir une place à l’étranger, etc.
Mais la raison principale était simplement l’envie de découvrir un pays nordique, et mon choix s’est porté sur les Féroé après avoir vu un documentaire et lu des documents sur les problèmes environnementaux présents sur place.
Les sujets que l’on m’a proposés étaient en lien direct avec mes études, je n’ai guère hésité avant d’accepter.
Comment s’est organisé ton voyage ? As-tu fait appel à des services type Erasmus ?
J’ai effectivement bénéficié de l’aide du service Erasmus+, qui m’a bien aidé pour les assurances et les formalités de stage. Par contre, le statut particulier des Iles Féroé a imposé des formalités administratives (permis de séjour, etc.) que j’ai dû régler seul.
Mes promoteurs sur place m’ont proposé un logement de l’université ; je n’ai donc eu aucune recherche à faire de ce coté.
Quelles ont été tes premières impressions une fois arrivé ? Ton intégration a-t-elle été facile ?
La première chose qui m’a frappé a été le paysage. Je suis arrivé à un moment particulier : c’était la première fois en plus de 10 ans qu’il y avait autant de neige, tout était recouvert, les torrents étaient gelés, c’était vraiment magnifique. La première impression a donc vraiment été positive !
Les premières impressions du labo furent aussi positives : le laboratoire dispose d’un équipement de pointe et mes collègues sont très chaleureux. Petit bémol : un léger retard quant à l’installation de nouveaux appareils, mais d’autres étaient là pour pallier à ce problème.
Comment s’est organisée ta vie au quotidien ?
La vie là-bas n’était au final pas si différente de la vie ici.
J’ai logé dans une maison d’hôtes de l’université comprenant 4 chambres et des communs. La ville étant relativement petite, tout était accessible à pied en moins de 30 minutes.
Point de vue budget, la bourse Erasmus a couvert l’ensemble du coût du séjour. Le coût de la vie est en moyenne plus élevé qu’en Belgique ou en France. Cela se voit non seulement dans les magasins mais surtout en cas de sortie.
Par contre, les bus sont gratuits et bien organisés, les taxis ne coûtent presque rien, les ferrys pour voyager d’une île à l’autre sont tout à fait accessibles. Il était possible de prendre une navette en hélicoptère à un prix tout à fait abordable !
Tous ces services sont très accessibles car ils font partie des transports en commun organisés dans l’archipel.
T’es-tu adapté facilement au climat, au rythme de vie là-bas ? Y a-t-il eu un « choc des cultures » ?
En arrivant en février l’adaptation a été simple : l’hiver sur place est plus chaud, il ne gèle que rarement, et au pire il fera -3°c la nuit. Par contre, les tempêtes de vent et de grêles sont des évènements banals auquel il est plus dur de s’habituer. Les journées sont de plus très sombres en hiver, il fait noir jusqu’à 8-9h du matin et à partir de 16-17h.
Au mois de mai le changement est radical : bien que le vent n’en démorde pas et que les températures ne soient pas des plus chaudes (15°C au max à midi), les journées sont beaucoup plus lumineuses : à 11h du soir il fait clair comme en plein jour ! Et à 4h du matin aussi. C’est agréable mais cela peut aussi être assez fatiguant, dur de trouver le sommeil quand il fait clair dehors !
J’ai vite compris que nos cultures sont très différentes, mais cela n’a en rien gêné mon intégration. Bien que les gens paraissent un peu réticents à discuter avec quelqu’un qui ne connait pas leur langue, ils sont en fait très sympathiques et très ouverts d’esprit, bien plus que nous !
L’identité culturelle est pour eux quelque chose de très important, leur connaissance du pays est incroyable. Une chose m’a cependant marquée : bien que le pays soit vraiment petit (en surface comme en population), très peu de locaux l’ont visité. Ils connaissent le pays mais ne l’ont généralement pas vu.
Présente-nous ta société en quelques mots : son domaine d’activités, ta place dans l’entreprise. As-tu rencontré des difficultés particulières ? La langue a-t-elle été un frein?
La société pour laquelle je travaillais est appelée Umhvørvisstovan (Environment Agency en Anglais). Elle agit dans divers secteurs : protection de l’environnement, cadastre, cartographie, maintenance de registres de la population, etc.
Je travaillais dans un laboratoire situé à environ 4-5 km du siège de l’entreprise, où plusieurs sociétés louent des locaux.
La langue est un frein : la langue maternelle est le féroïen, la deuxième langue est le danois mais l’anglais est appris dès l’enfance. Bien que le niveau soit variable, il est généralement très bon dans la population la plus jeune : j’ai su demander mon chemin et discuter avec un enfant de 10 ans en anglais dans la rue sans le moindre problème.
Avoir un bon niveau d’anglais est pour moi absolument nécessaire pour effectuer son stage dans un pays où le français n’est pas enseigné. Connaitre le danois serait idéal, encore faut-il en avoir la possibilité… Quant au féroïen, la langue est extrêmement compliquée (j’ai appris que même les noms propres sont accordés !).
Et à l’oral ?
En 4 mois, je n’arrivais toujours pas à prononcer correctement mon adresse... (Rires)
Sur quel projet as-tu travaillé pendant ces 4 mois ?
J’ai du établir, sur base de travaux et manipulations existants (provenant principalement du laboratoire NIVA de Norvège - Norsk Institutt for Vannforskning ; Norwegian Institute for Water Research), une méthode de préparation d’échantillons d’eau de mer pour la détection et la quantification d’un insecticide appelé Diflubenzuron.
Pour ce faire, j’ai sélectionné le matériel adapté (cartouches pour l’extraction de l’échantillon brut), sélectionné les solvants appropriés et les additifs, comparé leur efficacité, déterminé les gradients pour la chromatographie, et déterminé les paramètres pour la spectroscopie de masse.
La formation de bachelier en chimie t’as-t-elle bien préparé au travail que tu as effectué là-bas ? Est-ce que tu as complété ta formation par toi-même ?
Oui, la formation était tout à fait adaptée au travail confié. Certaines techniques étant soit très récentes soit moins connues, j’ai dû chercher de la documentation par moi-même afin de comprendre certaines choses, mais dans l’ensemble les cours m’avaient bien préparé. J’ai mis en pratique des notions vues en cours que je n’aurais pas cru devoir utiliser ; le stage m’a donc permis de faire le lien entre différents cours, chose que je n’avais pas forcément faite auparavant.
Quels conseils donnerais-tu à un étudiant qui souhaiterait se lancer dans une aventure similaire ?
Ne pas abandonner. Dans certains cas, la quantité de paperasse administrative pourrait être décourageante, mais cela en vaut la peine.
Pour un stage de longue durée (plus d’un mois) je contacterais directement l’ambassade afin de savoir s’il est nécessaire d’obtenir un permis de séjour/permis de travail. Apprendre trois jours avant de partir qu’un permis de résidence est nécessaire après 100 jours n’est pas une chose plaisante...
Eventuellement, prévoir de rentrer chez soi lors des vacances. Et comme un ami me l’a dit avant de partir : « Prends un maximum de photos, pas pour toi mais pour les autres ».
Un proverbe féroïen pour terminer ?
If you’re not satisfied with the weather, just wait for 5 minutes. Si tu n’es pas satisfait du temps qu’il fait, attends 5 minutes.
Ce n’est pas vraiment un proverbe, mais on me l’a dit lors de ma première semaine sur place, et cela s’est confirmé !